Nos désirs de jeune foyer
Dans nos rêves de fiancés, il y a avait le désir d'avoir une famille nombreuse. Etant respectivement d'une famille de 4 et de 3 enfants, il nous ne semblait pas difficile de faire de même et d'avoir peut-être 5, 6, 7, 8 enfants… qui sait ? L'année suivant notre mariage, nous eûmes la grande joie de voir naître notre premier enfant. Bien que cette naissance se soit passée normalement, Agnès fut par la suite dans un tel état d'épuisement et de désorganisation qu'un temps de repos s'avéra nécessaire avant une nouvelle grossesse, même si nous désirions beaucoup que notre fils ait rapidement un frère ou une sœur. Des personnes bien intentionnées de notre entourage avaient beau dire à Agnès : "N'oublie pas ta pilule !", c'était pour nous deux comme une langue étrangère, comme un discours qui s'opposait radicalement à notre désir d'enfant, et nous faisions confiance à l'Eglise qui proposait maternellement, mais clairement, aux couples, un autre chemin de bonheur que celui qui passerait par la contraception. Plus tard seulement nous comprîmes que l'enjeu était aussi en amont, dans la signification même de notre union.
Nous utilisâmes un peu la méthode des températures. Mais pour Agnès ce fut rapidement une sorte de corvée : prendre sa température à heure régulière lui donnait le sentiment d'être malade, alors qu'elle ne l'était pas du tout. Nous connaissions dans son principe la Méthode Billings, sans avoir eu de véritable formation complète. Providentiellement eut lieu à Lille, en octobre 1990, le Congrès de la famille, où les Billings eux-mêmes vinrent témoigner ! Nous commençâmes à pratiquer la Méthode avec confiance.
La douleur et la joie
Nous eûmes bientôt la joie de découvrir que nous attendions un 2ème enfant. Puis la douleur succéda à la joie car Agnès fit une fausse-couche à plus de 3 mois 1/2 de grossesse. Ce fut un vrai deuil pour nous. Le médecin nous conseilla d'attendre quelques mois avant de recommencer une nouvelle grossesse, afin de mettre toutes les chances de notre côté. Et c'est là que la Méthode s'avéra extrêmement précieuse. Agnès reprit ses observations avec confiance et nous recommençâmes fidèlement la tenue des tableaux. Pour Agnès, le fait de voir revenir les signes de sa fécondité et le déroulement normal de ses cycles était très bénéfique et nous reprenions espoir ; c'était une sorte d'encouragement à persévérer… En même temps, nous avions tiré concrètement la leçon de cet événement douloureux : nous n'étions pas les maîtres de la vie et notre désir ne suffisait pas pour avoir un enfant. Ce que nous savions auparavant en théorie avait pris toute la force de la réalité ! Plus encore qu'auparavant, nous plaçâmes notre famille entre les mains de Dieu : Il nous combla en nous donnant une jolie petite fille qui naquit 2 ans 1/2 après notre aîné.
Le désir de partager
Dès lors nous étions bien conscients de la grâce que nous avions de connaître la méthode Billings. Sollicités pour participer à un week-end de formation parmi les animateurs, nous acceptâmes avec joie parce que nous avions envie de partager avec d'autres couples ce que nous avions appris et qui nous semblait un trésor pour notre foyer : connaître notre fécondité, en être responsables sans en être propriétaires, vivre notre communion d'époux pleinement sans altérer le sens de l'union conjugale, ce don de soi total à l'autre, avec toutes les potentialités du moment de l'union, dans la réalité féconde ou inféconde de l'instant présent. Il nous semblait très important d'aider les foyers qui en avaient besoin à comprendre ce sens de l'union des époux, dans un contexte hédoniste où la sexualité est devenue un jeu ou une prouesse, et non plus un don complet de soi à l'autre dans un engagement d'amour exclusif et définitif, indissolublement lié au don de la vie.
Après avoir passé l'examen probatoire, nous devînmes moniteurs du Centre Billings France. Nous fîmes rapidement la connaissance de René et Marie Sentis, présidents et fondateurs du CBF. Les sessions nationales qu'ils organisaient étaient pour nous un vrai ressourcement et un lieu de formation continue d'une grande richesse, autant dans le domaine scientifique que sur le plan spirituel et moral. Chaque année nous y retrouvions de nombreux foyers venus de toute la France, et même de pays d'Afrique, de Suisse, de Belgique, du Luxembourg, avec lesquels nous avions de vrais échanges de connaissances et d'expériences… Ces sessions furent une sorte de vivier très intense d'où nous repartions enrichis de savoir et d'amitié, fortifiés dans notre engagement au service de l'amour et de la vie, que Marie Sentis nous présentait toujours comme un "bel apostolat", selon son expression.
De nouvelles épreuves et des grâces immenses
Pendant ces années, nous fîmes encore l'expérience du grand cadeau de Dieu qu'est le don de la vie. Mystérieusement, nous attendîmes plus longtemps que nous le souhaitions avant de réaliser une nouvelle grossesse. Enfin Agnès fut enceinte d'un garçon et cette grossesse se déroula normalement. Pourtant, au jour du terme prévu, un hématome rétro-placentaire obligea les médecins à pratiquer une césarienne en urgence ; Agnès faillit perdre la vie à cause d'une hémorragie violente : elle s'arrêta miraculeusement au moment où le médecin allait pratiquer l'hystérectomie qui seule semblait pouvoir la sauver. Elle dut être transfusée et resta plusieurs heures entre la vie et la mort. Nous sûmes plus tard que des prières ardentes montaient pour nous vers le ciel, tant de nos familles que de nos amis Billings ! Notre petit garçon qui avait été asphyxié in utero fut réanimé et put vivre durant 26 heures : le temps de recevoir le saint baptême !
Là encore, la Méthode Billings fut une aide précieuse pour nous redonner confiance et laisser Agnès prendre le repos nécessaire… Nous eûmes la grâce d'avoir ensuite une fille par voies naturelles, sans souci, paisiblement : dans ses prénoms nous avons ajouté Dieudonnée, car elle fut un vrai cadeau de Dieu pour notre famille.
Une autre forme de fécondité
Ensuite Agnès perdit encore trois enfants, à trois mois de grossesse environ, avec assez de complications la dernière fois pour que les médecins nous recommandent de ne plus essayer d'avoir d'enfant. Ce n'était pas une défense formelle, mais prudentielle, et exprimée quand même avec un peu d'insistance. Comme la santé d'Agnès était altérée également par des troubles circulatoires sérieux, nous décidâmes de renoncer à agrandir notre famille malgré notre souhait initial. Ce fut pour nous un temps de deuil de la paternité et de la maternité. Et nous comprîmes alors que nous pouvions avoir une autre forme de fécondité dans les responsabilités qui nous étaient confiées par le CBF pour la région Nord, dans la formation de nouveaux foyers moniteurs, ainsi que dans divers apostolats auxquels nous participions. Nous continuâmes sereinement à vivre nos unions sereinement, grâce à la Méthode Billings, sachant qu'elle est fiable si elle a été bien enseignée et bien comprise, et si elle est pratiquée avec rigueur par les époux. Bien sûr, il y a toujours la part d'erreur possible : mauvaise observation de la femme, interprétation erronée de cette observation, ou autre faille humaine… Mais nous pensions que si une nouvelle vie s'annonçait, en dépit de notre prudence, Dieu nous donnerait la grâce de mettre au monde cet enfant s'Il le voulait.
Ainsi c'est notre responsabilité d'époux qui fut remise volontairement dans la liberté de Dieu pouvant donner la vie à travers nous. Et nous rendons grâce car cette méthode a vraiment éduqué notre foyer, élevant nos cœurs vers le bien, dans les moments heureux comme dans les moments douloureux.
Vous retrouverez ce témoignage parmi ceux de nombreux autres foyers dans le livre de Céline et Gaétan Marion : Ils ont osé les méthodes naturelles (éd. Téqui, 2015)
Lectures conseillées :
Confidences Billings à un frère prêtre, par Gabrielle et Bertrand Vialla, présidents du CBF (à commander sur le site www.methode-billings.com). Ce livre n'est pas réservé aux prêtres et connaît déjà un vif succès auprès des couples.
Ils ont osé les méthodes naturelles ! par Céline et Gaétan Marion, préfacé par le cardinal Barbarin, et présentant de nombreux témoignages de couples d'horizons très variés (éd. Téqui)
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