Le prix exprime-t-il la véritable valeur des choses ?
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1.
L'économie moderne se caractérise par l'appropriation des choses à travers la notion de prix qui est le concept économique par excellence et qui semble définir scientifiquement la valeur des choses. Cette prédominance, loin d'être neutre et d'ordre secondaire ou technique, emporte avec elle des conséquences qui dépassent de beaucoup le champ que l'on assigne habituellement à l'économie, en particulier parce que nous croyons à la légitimité de cette démarche et à son objectivité et qu’elle en devient ainsi normative.
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2.
La première conséquence de cette croyance est que si toute chose a un prix, effectif ou potentiel, nous congédions la transcendance, la gratuité, l’humain et cela nous conduit inéluctablement à penser tôt ou tard que ce qui n'a pas de prix ne vaut rien ou n’est qu’une illusion inutile, alors qu'en réalité les choses les plus grandes et les plus belles de l'existence humaine n'ont pas de prix et sont en dehors de la sphère que l'ont peut "pricer".
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3.
La deuxième conséquence est que nous sommes poussés à croire que la formation du prix à partir du mécanisme de rencontre entre l'offre et la demande est une mécanique insoupçonnable et indépassable et, en conséquence, qu’elle est la seule à même de fonder la valeur effective des choses. La loi de l’offre et de la demande semble s’imposer objectivement à tous, alors qu’en réalité, la demande, l’offre et nos besoins sont des données manipulables, objets de stratégies marketing et publicitaires.
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4.
La troisième conséquence de cette croyance est qu’elle nous persuade que la valeur d'une chose est son prix et que la valeur épouse donc les aléas du prix et varier avec ce prix, alors qu’en réalité le prix ne dit jamais la valeur des choses : les théologiens médiévaux savaient bien que le prix était une menace susceptible de déstabiliser la véritable valeur des choses. Il n'est en réalité qu'un signal dans le cadre du système d'échangeabilité économique des biens, pas plus, pas moins.
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5.
Tout ce système de croyance qui idolâtre le prix doit donc être démonté point par point pour retrouver, à partir du Christ, un fondement à la valeur des choses qui n'ait plus rien à voir avec leur prix. Le prix veut nous convaincre que la valeur n'est qu'une illusion, mais c’est le contraire qui est vrai : seule la recherche de la vraie valeur des choses leur donne un sens réellement et profondément humain.
Normalien, énarque, haut fonctionnaire et philosophe
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modérateur du thème :
Pierre Dohet
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« Si l’on aspire seulement à doter d’un nombre croissant de biens un nombre croissant d’êtres, sans se soucier de la qualité des êtres ni de celle des biens, alors le capitalisme est la solution parfaite. » - Nicolás Gómez Dávila, Aphorismes.