Pourquoi ne peut-on être à la fois catholique et franc-maçon ?
-
1.
La franc-maçonnerie se réclame des confréries des constructeurs de Cathédrales des XII ° et XIII ° siècles, mais sa naissance dans la forme que nous lui connaissons s’est faite bien plus tard, au XVIII ° siècle, en Angleterre, dans le contexte de la fin des guerres de religion.
-
2.
L’Église catholique a condamné de manière presque immédiate toute forme de franc-maçonnerie, soupçonnant une stratégie cachée à laquelle les membres adhèrent en se liant par un pacte inviolable et secret, autour de principes suspectés d’être en opposition avec la foi chrétienne. De Clément XII à Benoît XIV, les reproches portent sur le secret, le serment, la suspicion des états temporels, le soupçon d’hérésies, et l’indifférentisme religieux compte tenu de la variété des participants. Après la Révolution, les accusations pontificales deviennent plus graves, y ajoutant la subversion politique à des erreurs théologiques comme le naturalisme ou encore le syncrétisme, et cela du pape Pie VII à Léon XIII inclus. Ce qui n’a pas empêché un large développement des loges, dans le monde anglo-saxon à majorité protestante, ainsi qu’en Europe, mais aussi dans la France encore catholique où les bulles des papes ont été ignorées jusqu’au Concordat de 1802.
-
3.
À la différence des franc-maçonneries anglo-saxonnes, qui sont restées des clubs un peu élitistes et spiritualistes, les loges se sont impliquées dès le début du XIXe siècle dans la vie politique et publique des pays latins, avec une évolution de plus en plus anticléricale. L’Église a dénoncé l’influence des loges dans la Révolution française de 1789 - même si cela fait débat entre les historiens -, dans la spoliation des États pontificaux, dans les révolutions de 1848, dans les idées socialistes et communistes, ainsi que dans les luttes en vue de la séparation de l’Église et de l’État.
-
4.
Le Pape Léon XIII publiera finalement le 20 avril 1884 l’Encyclique « Humanum Genus », pour reprendre et détailler les condamnations par ses prédécesseurs de cette « œuvre du démon », « au service du royaume de Satan », en reprenant et confirmant la sentence d’excommunication latae sententiae (automatique) et en détaillant longuement ce qui rend ce courant de pensée incompatible avec la foi catholique, notamment le secret, le naturalisme, l’ésotérisme, le syncrétisme et le fait que les membres s’engagent pour de mauvaises raisons à l’aveugle, « au service d’une stratégie qu’il ignorent ».
-
5.
Après Vatican II, l’établissement d’un nouveau code de droit Canon qui ne mentionnait pas explicitement la franc-maçonnerie a créé un débat vite refermé par la publication par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi de deux déclarations qui confirment que le jugement négatif de l’Église et les condamnations restent inchangés.
-
6.
Enfin, en dehors des questions proprement religieuses dénoncées par le Saint-Siège, le Grand-Orient de France (qui n’est qu’une obédience maçonnique parmi d’autres) prend régulièrement positions sur des questions politiques et morales qui ne peuvent qu’inquiéter, du fait d’un mode d’action opaque peu compatible avec les principes démocratiques.
Michel Viot, né dans une famille catholique, se convertit au luthéranisme et devient pasteur. Il accède à des responsabilités avec la charge d'une des plus importantes paroisses luthériennes de Paris, l'église des Billettes dans le Marais et bientôt le titre d'inspecteur ecclésiastique, l'équivalent d'un évêque catholique. Il appartient également à la franc-maçonnerie, qu'il défend dans un livre, "Ces francs-maçons qui croient en Dieu". Là aussi il exerce des responsabilités importantes. Cependant dans le protestantisme il dérange par ses opinions monarchistes et des rituels proches du catholicisme, encens, vêpres et même chant grégorien.
Il pense depuis longtemps retourner à sa foi d'origine et franchit le pas en 2001 : il démissionne de ses fonctions et se fait recevoir dans l'Eglise catholique. Comme il n'est pas marié, il postule aussitôt à la prêtrise, devient diacre puis prêtre en 2003. Vicaire à Romorantin, il est nommé aumônier de la prison de Blois puis curé de la ville et responsable d'un large secteur paroissial. Il donne en outre de nombreuses conférences et écrit des ouvrages de réflexion sur l'avenir de l'Eglise et les liens entre les différentes confessions chrétiennes. Attaché aux valeurs traditionnelles, il renvoie dos à dos intégristes et progressistes. Ainsi La révolution chrétienne et De Luther à Benoît XVI, deux de ses récents titres.
- « Chrétiens sans religion », Paris, Ed Albatros, 1975
- « Ces francs-maçons qui croient en Dieu », Paris, Ed Quai Voltaire, 1992. Rééd Monaco, Ed du Rocher, 1995
- « Paroles en chaire », Paris, Claire Vigne, 1975
- « Le Vrai et le faux : comprendre la pensée de Benoît XVI », Paris, Ed de l’Oeuvre, 2009
- « De Luther à Benoît XVI : itinéraire d’un ancien franc-maçon – entretiens avec Charles-Henri d’Andigné », Paris, Ed de l’Homme Nouveau, 2011
- « La Révolution chrétienne : la nouvelle évangélisation pour quoi faire ? – entretiens avec l’abbé Guillaume de Tanoüarn », Paris, Ed de l’Homme Nouveau, 2012
- « Les fondements bibliques de paternité et maternité », Versailles, Via Romana, 2013
- « Dieu et l’Etat : signification de la fête du Christ Roi », Versailles, Via Romana 2013
- « A l’écoute de la Bible - Année A - Homélies pour les dimanches et fêtes », Perpignan, Artège, 2013
- « A l’écoute de la Bible - Année B - Homélies pour les dimanches et fêtes », Perpignan, Artège, 2014
modérateur du thème :
Côme
4
commentaires
postés
Sur ces questions, il y a un excellent ouvrage assez méconnu "La Croix et le Compas", qui est un dialogue entre un écrivain chrétien et un grand maître franc maçon. On y découvre un certain nombre de révélations "étonnantes" de la bouche même du grand maître maçon ( sa fascination pour le serpent biblique, la filiation spirituelle de la franc maçonnerie avec Cain et Babel, le lien "symbolique" entre le régne de la franc maçonnerie et celui de l'antéchrist, sa "haine militante" de Dieu etc...)
Sur ce site on peut écouter le témoignage d'un 32ème degré de la GLNF qui s'est converti au catholicisme et a démissionné de la franc-maçonnerie : https://rcf.fr/actualite/franc-maconnerie-un-satanisme-qui-ne-dit-pas-son-nom
Il ne s'agit pas de minimiser des crimes ou de cacher des atrocités, mais de corriger des erreurs et de rappeler aussi des vérités.
Si l'Inquisition a causé 10.000 morts, c'est une information utile : cela veut dire que ce n'est pas 100.000 ni 1.000.000 et c'est très loin de 10 millions ou des 100 millions qu'on attribue parfois au communisme, alors qu'à entendre le discours ambiant, on a parfois le sentiment inverse que l'Inquisition fut bien plus grave que le communisme, non ?
Par ailleurs, on critique toujours l’Église sur une dizaine de sujets ponctuels (l'Inquisition, mais aussi les Borgia, les Croisades, Galilée, la pédophilie, etc) et on déforme souvent beaucoup les choses. Mais ces sujets ne concernent directement qu’une maigre partie des catholiques et on tend à oublier que la grande réalité de l’Église ce sont des multitudes d'hommes et de femmes, de prêtres, de moines, de moniales, de religieux et de religieuses qui donnent leur vie par amour pour leurs frères et pour Dieu, dans la prière, le don, la civilisation, le soin des pauvres, des malades, l'assistance aux mourants, aux faibles et aux désespérés. L’Église, c'est en réalité une vague de charité unique et jamais vue sur la surface de la terre (cf http://www.catholicscomehome.org/about-our-tv-commercials.php), mais qui le dit ? Certes, des fautes ont été commises sur chacun des points délicats évoqués plus haut, ce qui justifie qu’on en parle, mais honnêtement. L’objectif aujourd’hui est d’aller de l’avant et de constater que l’Église est la seule communauté qui demande régulièrement pardon pour ses fautes et qui est toujours ouverte au débat en raison à condition qu'il soit respectueux et constructif dans la recherche de la vérité. C'est cela que nous voudrions faire sur ce site, avec ceux que ça intéresse sincèrement.