Peut-on assimiler le « Big Bang » avec la Création décrite dans la Genèse ?

Le nom de Georges Lemaître, prêtre belge, est assez peu connu, sauf en Belgique, bien qu'il soit un des plus grands astrophysiciens du début du XX° siècle

Très tôt, ses professeurs constatent qu’il fait montre de talents de toutes sortes. Georges Lemaître s’intéresse particulièrement aux mathématiques et à la mécanique analytique. Il poursuit de solides  études scientifiques qui le mèneront au doctorat de mathématiques (soutenue en 1920), mais il s'intéresse en même temps au renouveau des études thomistes et à la théologie.
Il entre alors au séminaire de Malines, il obtient la permission des autorités du Grand Séminaire d’étudier la théorie de la relativité. Il rédige en 1922, un an avant de devenir prêtre, un mémoire qui se présente comme une synthèse personnelle de la relativité restreinte et générale.
Après son ordination, il visite plusieurs centres universitaires : d'abord à Cambridge (G-B) où il suit les cours du grand astronome Arthur Eddington. Puis pendant les années 1925-1926 il va au Massachusetts Institute of Technology, il y étudie notamment la relativité et poursuit ses recherches sur la compréhension des données cosmologiques ; ce qui constituera une nouvelle thèse de doctorat (son diplôme de Ph.D. lui sera donné en 1927).

C'est lui qui en 1927 fournit le premier cadre explicatif rendant compte de l'expansion de l'Univers 

A cette époque, quelques astronomes, dont Edwin Hubble et M. Humason, avaient observé un phénomène de décalage vers le rouge du spectre lumineux émis par les nébuleuses extra-galactiques, ce phénomène confirmé par des observations toujours plus précises était le signe (dû à l'effet de Doppler-Fizeau) que ces nébuleuses s'éloignaient de nous à grande vitesse. Deux théories cosmogoniques étaient alors en concurrence – celle d'Einstein d'un Univers statique et celle de Willem De Sitter d'un Univers vide quasi euclidien – mais aucune ne pouvaient rendre compte de ce phénomène. Ayant en tête ces observations, Lemaître dans un article intitulé « Un Univers homogène de masse constante et de rayon croissant », résout en 1927 les équations d'Einstein en supposant que le rayon de l'Univers varie avec le temps : dans l'espace tridimensionnel qui est le nôtres, les distances entre les galaxies augmentent de manière exponentielle avec le temps. Ce qui permet de fournir un cadre explicatif aux observations.
Une fois revenu à l'université de Louvain, il enseigne la mécanique et la relativité tout en assurant ses charges de prêtre de l'Église catholique, notamment en tant qu'aumônier des étudiants.

En 1931, dans un article paru dans la revue Nature sous le titre « Le Début de l'Univers selon la théorie quantique », Lemaître propose son « hypothèse de l'atome primitif »

Chacun s'accorde maintenant à reconnaître cette hypothèse comme une image stimulante due à la profonde et féconde intuition de son auteur. Selon ce modèle, l'histoire de l'Univers présente trois moments caractéristiques. D'abord une expansion rapide à partir d'un état où le rayon de l'Univers est quasi-nul. Cette singularité initiale de la relativité générale correspond à l'explosion provenant d'un « atome primitif » (le terme « atome » devant être compris comme ce qui ne peut pas couper). Dans cette première phase, l'espace-temps se crée en même temps que les produits de cette explosion -un plasma ultra dense- remplissent celui-ci. Dans un second moment, ce plasma très dense et très chaud et une énergie radiative extrêmement intense se détendent et se refroidissent ; cette condensation serait à l'origine de la formation des galaxies. L'Univers poursuit ensuite son expansion ce qui expliquerait le décalage vers le rouge du spectre lumineux.

Il est à noter que la théorie de l’Univers en expansion a été proposée indépendamment par le russe Alexandre Friedmann

Dans ses travaux antérieurs de quelques années, sans être allé aussi loin dans le développement de la théorie, il s'orientait exactement dans la même direction, en se fondant aussi sur les hypothèses de la relativité et les équations d’Einstein. Albert Einstein, alors persuadé de l’immuabilité de l’Univers, lit, émerveillé, l'article de 1931 fort bien rédigé de ce jeune prêtre qu'il avait déjà rencontré lors d’un congrès en Belgique en 1927 ; une photo  de l'époque nous montre un jeune prêtre intelligent portant le clergyman très détendu à coté du grand savant unanimement respecté (il était très bien accepté chez les scientifiques malgré son col romain, grâce à son enthousiasme à poursuivre ses recherches les plus complexes).

Une solide amitié va se nouer entre les deux théoriciens Lemaître et Einstein, bien qu’Einstein, dans un premier temps, contestera la théorie de Lemaître

Les principes de sa théorie se diffusent : « Nous pouvons concevoir que l’espace a commencé avec l’atome primitif et que le commencement de l’espace a marqué le commencement du temps » ; il y a une histoire naturelle de l'univers au cours de son expansion.

Cette théorie de l'explosion primordiale est l'une des plus marquantes du XX° siècle

C'est à cause de ces travaux que Lemaître reçoit en 1934 le Prix Francqui, la plus haute distinction scientifique belge.
Dans un article de la revue Nature, il répond à son ancien maître Eddington que l'idée d'un commencement du temps et de l'espace n'est pas du tout « répugnante », en effet toute l'histoire de l'univers n'est pas inscrite dans cet atome, comme la musique ne l'est pas dans un phonographe. L'histoire de l'univers se fait au pas à pas, toute la complexité du monde peut se développer.

L'importance de cette théorie dépasse de beaucoup le petit cercle des physiciens et on ne s'étonne pas qu'elle soit l'occasion de débats jusque dans les cercles philosophiques ou spirituels.

En 1951, Lemaître apprend que le pape Pie XII a fait un discours sur les « preuves de l'existence de Dieu à la lumière de la science actuelle », il transmet alors une supplique à Pie XII, dans laquelle il demande que ne soit plus liées dans les discours officiels, la notion théologique de création et son hypothèse de « l'atome primitif ». Lemaître, membre de l'Académie pontificale depuis 1936, chercha toujours à défendre l'autonomie des "deux chemins" : d'une part l'approche scientifique, d'autre part celle de la théologie. Pour lui, il ne pouvait en aucun cas être question de confondre la singularité initiale (le commencement naturel) avec la  Création ex nihilo des théologiens. Grâce à ses études de philosophie thomiste, il connaissait la différence que Thomas d'Aquin faisait conceptuellement entre l'acte créateur qui transcende toute temporalité - et qui est une relation par laquelle Dieu pose le monde dans son être - et la notion de commencement du temps physique (cf. Somme Théologique I° qu. 46).

Cependant, la théorie de la singularité initiale a pu être considérée comme proche de la vision chrétienne classique de la Création et les astrophysiciens athées l'ont immédiatement combattue

En particulier, l'astronome Fred Hoyle reprocha au chanoine Lemaître d’avoir bâti cette théorie pour coller au récit biblique et il défendit la vision, classique parmi les scientifiques de l’époque, de la matière éternelle et d’un Univers immuable.

L’appellation de cette théorie de Lemaître comme étant la « théorie du Big Bang» est d'ailleurs venue d’un mot de dérision lancé par Hoyle vers 1948

Lors d'une réunion en Californie en 1960, ce dernier se moque encore de Lemaître en l'accueillant par ces mots: « This is the Big Bang man ».

Lemaître avait prévu dans sa théorie que la gigantesque explosion initiale du Big Bang devait avoir laissé un rayonnement fossile, mais le monde scientifique avait prêté peu d’attention à cette idée

Les découvertes d’Edwin Hubble sur le mouvement des galaxies étaient un élément pour étayer sa théorie de l'atome primitif. De plus, Lemaître avait prévu dans sa théorie que la gigantesque explosion initiale du Big Bang devait avoir laissé un rayonnement fossile, mais le monde scientifique avait prêté peu d’attention à cette idée et la controverse continuait. Puis un américain d'origine russe, Georges Gamow, précise alors cette théorie et calcule ce que devrait être le rayonnement fossile correspondant. Il le prédit sous forme d'un rayonnement thermique de corps noir à la température de 5 degrés Kelvin.

En 1965, à la surprise générale, ce rayonnement fossile est découvert par hasard

C'est le fait d'Arno Penzias et Robert Wilson, chercheurs à la Bell Telephone Compagny, qui manipulent les premiers radiotélescopes. Ce rayonnement fossile, que Lemaître avait appelé « l'éclat disparu de la formation des mondes », est finalement mesuré à la température de 2,7 degrés Kelvin, et il provient de toutes les parties de l’Univers ! 

« Je suis content maintenant, au moins, on en a la preuve »

Lorsque quelques jours avant sa mort, on lui apprend la découverte de ce rayonnement fossile, l’auteur de la théorie du Big Bang qui venait d'être transporté à l'hôpital, dit alors simplement : « Je suis content maintenant, au moins, on en a la preuve ».
L’opposition à la théorie du Big Bang cessera progressivement à partir des années 1970.
Aujourd’hui la quasi-totalité des scientifiques admettent que cette théorie est valable juste après l'instant initial qui est à l'origine de la singularité, même si des physiciens théoriciens s'évertuent à construire des modèles pour décrire cet « avant  l'instant initial ».

1°/ la science et de la foi ne peuvent s'opposer

L’idée, souvent entendue dans les médias d’une opposition entre la science et la foi chrétienne, reçoit un démenti formel quand on revient sur la vie et l'oeuvre de Lemaître : celui-ci a toujours promu et encouragé fortement l’usage de la raison et était un prêtre pieux et très soucieux de transmettre sa foi.

2°/ ce sont des approches dans des registres distincts

Par ailleurs, Lemaître s'est toujours défendu de tout concordisme. Il affirmait par exemple en 1958 : « Une telle théorie reste extérieure à toute question métaphysique ou religieuse. Elle laisse le matérialiste libre de nier tout Être transcendant. Pour le croyant, elle empêche toute tentative de familiarité avec Dieu, comme l'étaient la chiquenaude de Laplace ou le doigt de Jeans. Elle est en consonance avec la parole d'Isaïe parlant du "Dieu caché" caché même au commencement de la création". Georges Lemaître avait été aussi professeur de philosophie.

3°/ l'émerveillement devant la nature est un chemin pouvant conduire à la contemplation

De même Einstein était dans l'admiration et le respect du cosmos : «devant l'univers, celui à qui le sentiment religieux est inconnu et qui n'est pas frappé de respect, c'est comme s'il était mort », de même Lemaître évoquait notre émerveillement quand nous laissons le ciel et la terre raconter la gloire de Dieu. Ainsi, dans son livre « L'hypothèse de l'atome primitif » après 60 pages de considérations mathématiques et astrophysiques, il note que l'on ne peut pas terminer « sans exprimer aussi notre gratitude envers Celui qui a dit: 'Je suis la Vérité', qui nous a donné l'intelligence pour Le connaître et pour lire un reflet de Sa gloire dans notre univers qu'il a si merveilleusement adapté aux facultés de connaître dont II nous a doués » (page 66). Devant un tel spectacle de l'univers, si difficile à imaginer et en même temps accessible à nos sens, l'homme ne peut que ressentir au fond de lui-même un cri d'admiration.

Louis Pasteur (1822-1895), célèbre biologiste et chimiste 

« Quand on a bien étudié, on revient à la foi du paysan breton. Si j’avais plus étudié encore, j’aurais la foi de la paysanne bretonne». 

Albert Einstein (1879-1955), célèbre physicien

« Tout homme de science doit éprouver une sorte de sentiment religieux, parce qu’il ne peut s’imaginer qu’il est le premier à concevoir les faits incroyablement délicats qu’il observe. Dans l’univers inimaginable se révèle une intelligence infiniment supérieure » 

Charles Darwin (1809-1882), pionnier de la théorie de l'évolution

« Je n’ai jamais nié l’existence de Dieu. Je crois la théorie de l’évolution parfaitement conciliable avec la foi en Dieu. Il est impossible de concevoir et de prouver que le splendide et infiniment merveilleux univers, de même que l’homme, soit le résultat du hasard; et cette impossibilité me semble la meilleure preuve de l’existence de Dieu ». 

Johannes Kepler (1571-1630), célèbre mathématicien et astronome

« Que Dieu est grand ! Que sa puissance et sa sagesse sont infinies ! Ciel, soleil, lune, planètes, proclamez sa gloire ! Proclamez sa gloire, harmonies célestes ... Autant qu’il fut donné à mon chétif esprit de saisir ton infinité, j’ai voulu révéler aux hommes la sublimité de ta création». 

Nicolas Copernic (1473-1543), célèbre astronome polonais

« Qui ne s’exalterait au spectacle de ce qu’il voit dirigé dans l’ordre le plus parfait avec une sagesse divine, qui n’admirerait le Maître de toutes choses ? » 

Isaac Newton (1643-1727), célèbre physicien et mathématicien

« Ce que nous savons est une goutte d’eau, comparé à l’océan de ce que nous ne savons pas. L’ordre merveilleux du soleil, des planètes et : des comètes ne peut avoir d’autre origine que les plans et la direction d’un Etre tout-puissant au savoir absolu ».

Carl von Linne (1707-1778), fondateur de la classification des plantes 

« J’ai vu passer Dieu. Je ne l’ai pas vu en face, mais ce reflet de lui, saisissant soudain mon âme, l’a jetée dans la stupeur et l’admiration».

Alessandro Volta (1745-1827), célèbre par sa découverte des courants électriques

« J’ai toujours tenu et je tiens pour unique, vraie et infaillible, notre sainte Religion catholique; et je remercie Dieu sans fin de m’avoir infusé cette foi dans laquelle je suis résolu à vivre et à mourir». 

André-Marie Ampère (1775-1836), fondateur de l'électrodynamique

« Que Dieu est grand ! Que Dieu est grand et que notre savoir n’est rien !» 

Augustin Louis Cauchy (1789-1857), le plus grand mathématicien du XIXème siècle

« Je suis chrétien, c’est-à-dire que je crois la divinité de Jésus-Christ, avec Tycho Brahé, Copernic, Descartes, Newton, Fermat, Leibniz, Pascal, Grimaldi, Euler, Guldin, Boscowich, Gerdi, avec tous les grands astronomes, tous les grands physiciens, tous les grands géomètres des siècles passés ». 

Carl Friedrich Gauss (1777-1855), célèbre mathématicien et naturaliste allemand

« Lorsque notre dernière heure aura sonné, ce nous sera une joie indicible de voir disparaître le voile épais qui couvrait nos yeux».

Justus Liebig (1803-1873), célèbre auteur de la chimie appliquée 

« Celui qui s’efforce de lire les pensées de Dieu dans le livre de la nature peut seul connaître sa grandeur et sa sagesse infinies ».

Robert Mayer (1874-1878), un des plus célèbres physiciens (mécanique de la chaleur)

« J’achève ma vie avec la conviction la plus profonde que les sciences naturelles et la philosophie ne peuvent être que le préambule de la religion chrétienne». 

Angelo Secchi (1803-I895), prêtre jésuite, célèbre astronome 

« De la contemplation du ciel à Dieu, la route n’est pas longue».

Jean-Henri Fabre (1823-1915), l’illustre entomologiste français 

« Le monde est régi par une intelligence infinie. Plus j’observe, plus je vois cette intelligence qui rayonne derrière le mystère des choses. Je sais qu’on ne manquera pas de m’en railler. Très peu m’en soucie. On m’arracherait plutôt la peau que la croyance en Dieu.... Dieu ? Je n’y crois pas : je le vois ». 

Carl Ludwig Schleich (1859-1922), célèbre chirurgien

« Je suis devenu croyant à ma façon, par le microscope et par la contemplation de la nature, et mon désir est de contribuer de mon mieux à unir la science et la religion». 

Guglielmo Marconi (1874-1937), inventeur de la télégraphie sans fil, prix Nobel 1909 

« Je suis fier de me déclarer croyant. Je crois en la puissance de la prière. J’y crois non seulement comme catholique, mais aussi comme savant ». 

Robert A. Millikan (1868-1953), célèbre physicien américain, prix Nobel 1923

« Je dois affirmer catégoriquement que l’incroyance est dépourvue de tout fondement scientifique. J’estime qu’il n’existe aucune opposition entre la foi et la science». 

Arthur Eddington (1882-1946), célèbre astronome anglais

« Aucun des inventeurs de l’athéisme ne fut un homme de science. Tous ne furent que de très médiocres philosophes ».

Max Planck (1858-1947), fondateur de la théorie des quanta en physique moderne, prix Nobel 1918 

 « Rien ne nous empêche donc et notre instinct scientifique réclame... d’identifier l’ordre universel de la science et le Dieu de la religion». « Pour le chrétien, Dieu se situe au début, pour le physicien à la fin de la pensée ». 

Erwin Schrodinger (1887-1961), spécialiste de mécanique quantique, prix Nobel 1933 

«Le plus délicat chef-d’œuvre qui fut jamais réalisé le fut suivant les principes essentiels de la mécanique des quanta de Dieu » - 

Wernher von Braun (1912-1977), pionnier du programme spatial

« Par-dessus tout à Dieu revient l’honneur d’avoir créé le grand univers, que l’homme et sa science pénètrent et étudient de jour en jour avec une profonde vénération».