Les différents rites catholiques opèrent une relation intime entre Dieu et l’homme qui le cherche. Par des gestes, des chants, la proclamation de la Parole, les bénédictions, prières et oraisons sont réconciliées avec le réel.
L’oraison, vraie école de prière
On dit souvent que l’on ne sait pas prier. Il suffit de regarder comment prie l’Église dans sa liturgie pour savoir prier dans sa chambre. Une oraison est toujours composée en quatre temps : d’abord, on s’adresse à Dieu, on le nomme, on fait un rappel de ce qu’il a fait, on fait mémoire, puis on demande et enfin on fait sa demande, « Par le Christ Jésus, Notre Seigneur. ». C’est pourquoi toute oraison se termine par cette phrase. Si l’on priait ainsi chez soi, on aurait une vie spirituelle forte car en appliquant le langage charnel de se mettre à genoux dans un coin, on se met en présence de Dieu, on l’invoque.
La liturgie pousse à prier localement là où on s’engage
Plonger dans la Bible, plonger dans la Parole de Dieu, faire mémoire de ce qu’il a fait, que ce soit dans l’Ancien ou le Nouveau Testament ; tout cela permet d’être beaucoup plus à même de savoir ce que l’on peut demander à Dieu pour aujourd’hui. Et on peut même lui demander l’impossible. On n’est pas dans une sorte d’élucubration superstitieuse « Tu as fait ceci, donc je pense que tu dois le refaire aussi aujourd’hui. » À Dieu ensuite d’agir comme Il l’entend. En général, Il n’agit pas de l’extérieur. Par exemple, si on demande la paix dans le monde, ce n’est pas la peine de demander au Seigneur de convertir les musulmans d’Irak : Dieu ne le fera pas. En revanche, si on demande la paix, cela veut dire que nous d’abord, nous nous engageons à travailler à la paix, là où on est. Si on commence ainsi à travailler localement à la paix dans le monde, alors il y aura un peu plus de paix dans le monde. On peut prier pour les frères chrétiens en Irak, et parce que nous nous engageons localement dans la paix, dans la communion des saints, Dieu pourra effectivement entreprendre une démarche avec un de nos frères chrétiens en Irak qui pourra faire que le témoignage touchera éventuellement le cœur de quelqu’un.
Le rite de la paix du Christ réconcilie la prière universelle avec le réel
Inutile d’avoir des prières universelles qui demandent la paix dans le monde ou qui sont des manifestes de programmes sociaux. Quand on prie pour quelque chose, on s’engage « Donne-nous, Seigneur, là où on est, de vivre ce que nous demandons. » Là aussi, la liturgie est très éducatrice et change ma prière pour m’engager là où je suis, à vivre, à obéir concrètement au commandement du Christ : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. » (Jean 13, 34) C’est la liturgie qui apprend cela, parce que l’on ne vit pas la liturgie avec le président des États-Unis ou avec un musulman d’Irak. On la vit avec son voisin et même si on est en opposition avec lui, s’il est juste à côté à l’église, au moment de la paix du Christ, on se tourne vers lui et on la lui donne. La voilà, la chair ! Ce que l’on vit dans la chair va m’obliger à changer mon comportement dans la vie. Pour être cohérent avec moi-même, si je lui donne la paix dans l’église, cela veut dire que je m’engage charnellement à travailler à la réconciliation du voisinage une fois rentré chez moi. Alors la liturgie a fait son œuvre.
La liturgie de l’Eucharistie fait retentir la Parole de Dieu dans tout notre être
Si on a un minimum d’éclairage spirituel, le chrétien est conscient d’être indigne de venir célébrer, de s’approcher du sanctuaire et de se nourrir du Corps du Christ. Aller à la messe, c’est alors se mettre sous le regard de miséricorde du Seigneur, et là, on est rétabli dans sa dignité, jusqu’à poser l’acte le plus fort qui soit donné de faire dans sa vie : communier avec Dieu. Fort de la Parole proclamée, on partage la foi de toute l’Église que va formaliser le Credo. Là encore, c’est un rite : fort de ce Credo on va apprendre que l’intercession portée par tout le peuple, toute l’Église, a du prix aux yeux de Dieu. Et puisque l’on est capable de porter une intercession, qui est un acte véritablement sacerdotal, le Seigneur va répondre en se donnant : là repose le mystère de la liturgie eucharistique. Que fait-on pendant l’Eucharistie ? On refait une oraison, c’est-à-dire que l’on invoque le Seigneur, on fait mémoire de ce qu’il a fait dans l’histoire, on Lui demande de le refaire au nom de sa fidélité et on lance la préface. Pendant la préface, on dit quel est le mystère que l’on est en train de célébrer ; ce peut être le mystère de Noël, le mystère de Pâques, le mystère de la Rédemption, le mystère de la Résurrection. Fort de cette préface, on revit charnellement le repas du Christ, c’est-à-dire que l’on est comme les apôtres qui sont autour du Christ. On va redire les mêmes paroles, les vivre dans la chair grâce à l’Esprit Saint car il n’y a pas de consécration possible sans sa présence. Et enfin, puisque le rite nous a unis charnellement au Christ à travers toutes les prières qui ont été énoncées, on est prêt à communier ; à consommer concrètement notre union au Christ dans la chair. C’est vraiment un mystère extraordinaire qui ne peut pas ne pas retentir sur toute notre vie.
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commentaires
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J'ai beaucoup appris aujourd'hui surtout sur la messe. Une question pourtant: si la chair est si importante, n'est-il pas malheureux que les ames montassent au ciel sans leur corps en attendant la resurrection finale?
Très profond, très juste, très 'vécu': ce commentaire de la 'divine liturgie' est très éclairant sur le sens profond des gestes, paroles, attitudes que l'on effectue trop souvent un peu trop en mode automatique. Vivre la liturgie telle que vous l'expliquez est sans doute la plus belle expérience de vie et de Vie que l'on puisse avoir. Lorsque je le fais ainsi, j'accède à un autre niveau d'être, là où je peux rencontrer Dieu. Merci
Vos mots sur la liturgie viennent de l'intérieur et résonnent d'expérience spirituelle . Merci. La transcendance divine vient modifier la chair et la raison (on pourrait dire l'âme en ce qu'elle comprend les facultés de raisonnement, de compréhension, de sentiments et d'affections). La liturgie de la prière agit comme un véhicule de transformation du corps et de l'âme dans ses différents composants. La sensation de la grâce au plan des sens physiques et au delà de ceux-ci en est une manifestation intérieure. La Tradition chrétienne est détentrice d'une donnée unique et nécessaire la différenciant des diverses traditions religieuses puisque la grâce agit au travers du don du corps et de l'âme de Jésus Christ dans notre humanité. Nous vivons ce lien par nos actes avec nos frères et cette fraternité soutient notre assomption au travers du don de Jésus Christ, de son corps et de son âme . Ainsi, l'Amour s'imprègne par don dans les aliments d'une table spirituelle comme le repas que savait offrir votre maman. Est il alors nécessaire de chercher la valeur de sa valeur sauf à se rassurer sur la justesse du chemin?