A-t-on résolu l’énigme de l’apparition de la vie ?
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1.
L’histoire humaine a longtemps cru que cette question était simple parce que la vie semblait être « une propriété de la matière et elle pouvait surgir spontanément dès que certaines conditions étaient réunies » : ainsi depuis l’Antiquité, on croyait à la « génération spontanée ». Cette vision confirmait un a priori philosophique qui remontait aux philosophes grecs. Diderot et bien d’autres pensaient encore au XVIIIe siècle que la matière était vivante et Darwin aussi, quand en 1871 il décrivait ainsi l’apparition de la vie : « La vie est apparue dans un petit étang chaud, dans lequel il y avait un riche bouillon de produits chimiques organiques, à partir desquels s\'est formé le premier organisme primitif à la suite d\'une longue période d\'incubation durant les temps géologiques. »
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2.
De nombreux savants ont travaillé à prouver que cette théorie est fausse, et en 1861 Louis Pasteur fait la démonstration définitive que la génération spontanée est impossible. Depuis, l’apparition de la vie sur terre apparaît comme une énigme insoluble, ainsi que l\'explique Jacques Monod, athée (de tendance atomiste et non pas stoïcienne) et prix Nobel de médecine : « Le problème majeur, c’est l’origine du code génétique et du mécanisme de sa traduction. En fait, ce n’est pas d’un problème qu’il faudrait parler, mais plutôt d’une véritable énigme » ( Le hasard et la nécessité, 1970).
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3.
Comment ce problème se pose-t-il aujourd’hui ? Pour que la vie puisse exister, tous les étudiants apprennent qu’il faut déjà quatre conditions nécessaires : bonne température, bonne pression, de l’eau liquide, de l’oxygène, et jusqu’ici on pensait qu’il fallait aussi de la lumière, mais ce n’est sans doute plus une condition nécessaire.. Donc les quatre conditions sont nécessaires, mais elles ne sont absolument pas suffisantes.
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4.
Il faut au préalable qu’existe et soit opérationnel le fameux ADN. C’est un véritable langage complexe. Et il faut également qu’existe un autre langage : celui des protéines indispensables pour renouveler les cellules. Enfin, un « traducteur » est requis entre ces deux langages. Le prix Nobel de Chimie 2009 a été donné à trois chercheurs qui ont travaillé sur ce sujet précis : « Comment fonctionne le traducteur entre les deux langages, celui de l’ADN et celui des protéines ? »
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5.
Ce système a dû être opérationnel avant l’apparition de la vie sur terre, et, selon des spécialistes, il n’aurait subi quasiment aucune évolution depuis 3,7 milliards d’années ! Le système a ensuite permis l’apparition d’organismes vivants de plus en plus complexes.
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6.
Platon voyait l’homme dans une perspective dualiste corps-âme et comme le mélange contre nature d’un principe divin (l’âme) et d’un principe matériel mauvais (le corps). En sorte que mon corps était la prison de mon âme ! (« soma sema »). Aristote, contestant son maître, arrivait à une conclusion diamétralement opposée : l’âme n’est pas quelque chose qui tombe dans le corps, c’est quelque chose qui construit l’organisme. Sans psyché-anima-âme, pas d’organisme, puisque c’est la psyché-anima-âme qui organise la matière pour construire l’organisme et « l’animer ». C’est pourquoi l’expression « matière vivante » est impossible comme rappelait le professeur Lejeune : « La matière vivante n’existe pas, il n’existe que de la matière animée (ou non). » La découverte de la structure en double hélice de l’ADN en 1953 constitue finalement un argument décisif en faveur de la vision aristotélicienne et d’un principe organisateur intelligent. À travers toutes les découvertes récentes des sciences biologiques, nous en savons davantage sur le commencement de la vie : nécessité d’inventer et de mettre en place deux langages, avec chacun son alphabet, son vocabulaire et sa grammaire. Mais le mystère s’est épaissi. La question d’une intelligence organisatrice n’est-elle pas devenue une hypothèse rationnelle ? Nous observons que l’hypothèse d’Aristote est devenue tout à fait contemporaine : il faut sans doute de l’intelligence pour fabriquer des êtres vivants, mais où est cette intelligence ? En tout cas, le grand Schrödinger (1887-1961) (le grand physicien, philosophe et théoricien scientifique autrichien, un des pionniers de la physique quantique) nous laisse son constat : « La vie est une victoire sur l’entropie ».
Brunor est illustrateur indépendant et scénariste de bandes dessinées depuis 1988. Il travaille pour la presse, l'édition et la communication d’entreprise. Avec sa série les Indices-pensables, il invente la bande dessinée d’investigation essentielle où il réussit à rendre accessibles des indices pour une passionnante enquête réaliste sur la question de l’existence de Dieu.
- Les Indices-pensables, textes et dessins de Brunor :
- Tome 1 : Le Mystère du soleil, 2009, Sarment Éditions du Jubilé
- Tome 2 : Un Os dans l'évolution, 2011, Sarment Éditions du Jubilé
- Tome 3 : Le Hasard n'écrit pas de message, 2011, France catholique
- Tome 4 : La Lumière fatiguée, 2012, France catholique
- Tome 5 : L'Être et le néant sont dans un bateau, Brunor éditions, 2014
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Bruno Brunor
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Je viens de lire l'ensemble de cet article (tel qu'affiché à la date du 9/4/2018) ainsi que les commentaires qui y sont attachés. .1 Merci à tous (site aleteia, auteur-vulgarisateur Brunor, et scientifiques ayant réagi, en particulier Docteur en biochimie 22/02/2016 avec un résumé synthétique édifiant qui montre que l'on est encore très loin de parvenir à une explication satisfaisante - d'un point de vue scientifique - de la vie: "Savoir comment ce système de couplage s'est mis en place dans les premiers âges de la vie est une question qui est encore loin d'être résolue, même si plusieurs hypothèses ont été proposées". .2 Une question m'apparait, à propos de la réflexion sur le hasard dans cette histoire. Nos scientifique semblent admettre sans que celà les trouble que le hasard - défini comme une séquence de mutations individuelles - aurait comme effet d'aller d'un état disons "initial" de simplicité vers un état disons "évolué" de complexité stabilisée. D'où vient cette supposition? Si le hasard des mutations est effectivement du hasard (une séquence t non pas un enchaînement), il devrait concourir autant et même plus à la destruction de systèmes organisés plutôt qu'à leur construction. Du coup, l'univers n'aurait jamais dû se charpenter en structures organisées . Or nous constatons que l'organisation prime ou en tout cas émerge du désordre o chaos. Pour moi, cet article et les interventions attachées me le confirment, les scientifiques - qu'ils soient ouverts ou résolument hostiles à une dimension spirituelle est un autre débat - obtiennent de magnifiques résultats - effectivement fruit d'un long travail mis en oeuvre au fil des siècles, travail qui doit être respecté - quand il s'agit de décrire le "comment", mais ils échouent, à moins qu'ils ne se fourvoient - on ne dira jamais assez comment des scientifiques idéologues matérialistes font ou ont fait grand tort à leur corporation tout au long de la longue histoire des sciences, dès l'instant où ils font choix de laisser parler leurs passions plutôt que leur raison - , quand il s'agit d'expliciter le "pourquoi". Pour moi, le hasard ne peut être un alibi ou une excuse. Il serait même plutôt, si l'on veut prendre la peine de réfléchir, un contre-argument à la "croyance" en un univers auto-régulé et auto-construit. Il est vrai que l'on sort ici du domaine des sciences.
au commencement était le Verbe...
La science traite des phénomènes physiques: elle ne peut donc se prononcer sur ce qui ressort du spirituel. Chacun est libre de penser que la perfection du monde est, ou non, le reflet d'une intelligence créatrice. La foi consiste (entre autres convictions) à le penser. Qu'en est-il des faits concrets? Il est incohérent, d'un point de vue rationnel, d'arguer du "hasard et de la nécessité": en fait cette association est un quasi oxymore. Si notre monde est le fruit d'événements relevant du hasard, il devrait être chaotique. Arguer qu'il y aurait une sélection de la 'meilleure solution', c'est en fait reconnaître qu'il y a bien un ordre immanent pré existant vers lequel le jeu des essais successifs tend: qui alors peut contester à cet ordre pré-existant un statut supérieur...? Ainsi donc, si la science ne peut démontrer l'existence de Dieu, l'observation de ce qui nous entoure et l'exercice de notre raison ne peuvent, à tout le moins, exclure cette hypothèse.
@ Brunor : POINT 1 : Je me demande bien quelles matières sont enseignées à vos étudiants. L'état des connaissances c'est que l'atmosphère de la terre primitive ne contenait pas d'oxygène et que celui-ci y a été rejeté par les premières bactéries. Vivantes, les bactéries. POINT 2 : Votre erreur fondamentale, et classique, est de considérer qu'une intelligence est à l'œuvre là où simplement "tout" a été essayé et qu'il ne reste plus que ce qui a marché. Tout ce que l'on voit "fonctionne", non pas parce que ça a été conçu par une intelligence, mais tout simplement parce que les alternatives qui ne fonctionnaient pas ou fonctionnaient moins bien ont disparu. Reprenons le mécanisme clé de réplicateurs soumis à mutation et sélection. Un mécanisme de copie fiable, avec une fiabilité d'une erreur par million, ne fonctionne qu'avec des réplicateurs ayant une structure "discrète" et non pas "continue". Les objets "continus" se dégradent nécessairement à chaque duplication, ne peuvent garder leur propriétés longtemps et donc disparaissent. Seuls les réplicateurs à structure discrète subsistent. Il se trouve que les propriétés chimiques des molécules ACGU permettent un appariement suffisamment fort et suffisamment faible pour que cette copie se produise : cet ensemble de 4 éléments fournis donc une structure discrète copiable. Pour des besoins de vulgarisation on choisit d'appeler ces éléments "alphabet", et d'appeler leur mode combinatoire "grammaire". Ce ne sont que des images. Le fond du sujet c'est que dans la foison des molécules il s'en est trouvé quatre qui s'appariaient de cette manière. Vous pouvez y voir une intelligence si ça vous chante, on peut y voir une quasi obligation au vu du nombre d'expériences chimiques se déroulant pendant des milliards d'années dans l'ensemble des océans de l'ensemble des planètes de l'univers. Il n'est nul besoin d'une intelligence pour faire apparaître des structures complexes à partir de "bonne" matière inerte, cela c'est certain. La "vraie" question est de savoir s'il faut une intelligence pour disposer d'un univers permettant une chimie du carbone (ou équivalent) : on entre alors dans le débat sur l'origine de l'univers, qui est intéressant également mais n'est pas l'objet de votre article. Bien cordialement.
Bonjour Brunor, merci de votre réponse. Vous excuserez la mise en page mais j'ignore comment on peut garder les sauts de ligne dans les commentaires, je numérote donc vos points. POINT 1 : l'Oxygène. Il va vous falloir trouver une meilleure excuse que cela. C'est vous-même qui avez distingué "de l'eau" d'une part et "de l'oxygène" de l'autre. C'est donc bien que vous ne comptez pas le deuxième lorsqu'il est inclus dans la première - sinon il vous faut réduire votre liste d'éléments - et que vous faisiez référence à la vie aérobie et non à la vie tout court. Vous pouvez donc corriger discrètement l'article soit en réduisant votre liste soit en modifiant votre terme de "vie", mais vous voudrez bien ne pas m'accuser de votre propre impéritie. POINT 2 : L'ARN. Votre impasse est sur le fait que la molécule d'ARN peut se dupliquer toute seule sans l'aide de protéines ou de cellules, donc dans un monde prébiotique. C'est une piste très sérieuse de la façon dont on a pu passer de la matière inerte à la vie (j'y reviendrai) et c'est sans doute ce même point que vous signalait "Docteur en biochimie" il y a trois mois déjà. Vous n'avez pas cru bon d'étudier cette question depuis lors, ce qui fait que votre article est toujours aussi erroné, et que vous répondez par de magistraux contresens aux remarques qui vous sont faites. Je vous encourage à prendre au sérieux les commentaires de "Docteur en biochimie", ou à faire reprendre vos articles par une personne ayant des compétences dans ce domaine. POINT 3 : la sélection des réplicateurs. Vous semblez tout ignorer du mécanisme de sélection naturelle, qui précède la vie et lui ouvre la voie, ce qui est regrettable pour écrire un article portant un tel titre. Je partage la déception de "Docteur en biochimie" quant au comité éditorial de ce site. Très schématiquement le principe est le suivant : dès lors que vous avez "quelque chose" qui a 1) la capacité à se dupliquer, 2) la capacité à muter au hasard (et oui, c'est un terme parfaitement scientifique mais le débat nous emmènerait trop loin) et 3) réside dans un environnement fini, vous avez mécaniquement, obligatoirement, sans aucune intervention intelligente, un mécanisme de "sélection du plus apte" qui s'instaure. Car c'est une simple tautologie : le "quelque chose" à qui il advient une mutation qui favorise soit sa durée de vie soit son taux de duplication, verra sa descendance envahir l'espace disponible aux dépens des autres "quelque chose". Et parmi cette descendance, à nouveau le mutant le plus apte à se dupliquer prospèrera et les autres disparaîtront. C'est bien de l'auto-organisation, sans la moindre trace d'intelligence. Désolé pour Aristote, c'est Darwin qui a trouvé le truc. Ce mécanisme s'exerce évidemment que le "quelque chose" soit une molécule, une cellule, ou un organisme complet. C'est le moteur fondamental qui permet de passer de l'inanimé à l'animé, et qui ensuite gouverne l'évolution. C'est la base de la base de l'initiation aux théories sur "l'apparition de la vie". Pas une miette de philosophie là-dedans. Bien cordialement, c'est un plaisir d'échanger avec vous.
Point 1 : Je crois qu’il y a un petit malentendu : D’une part ce n’est pas moi qui ai inventé ce qu’on appelle jusqu’ici « les 5 conditions nécessaires à l’apparition de la vie », mais c’est ce que les étudiants apprennent. Il vous diront : Il faut une bonne température, bonne pression, oxygène, eau liquide et lumière. Nouveauté ces dernier temps : La lumière pourrait ne plus être une condition nécessaire. OK, on progresse. Vous me dites : l’oxygène non plus. Ok. Cela fait deux anciennes conditions nécessaires en moins.
D’autre part, si les chercheurs nous disaient : on vient de découvrir que les 3 autres conditions ne sont pas nécessaires non plus… Très bien, il nous faut désormais en tenir compte et réfléchir en prenant acte du réel.
Car la grande question n’est pas : l’oxygène est il nécessaire ? Ce n’est pas : une bonne pression est-elle nécessaire ?... ou une bonne température ?
Ce n’est pas à moi d’y répondre mais aux chercheurs qui nous font part de leurs découvertes.
Car la grande question est : Comment des alphabets des langages et des grammaires peuvent ils s’inventer tout seuls et communiquer entre eux ?
( Puisque les lauréats du Prix Nobel de chimie nous apprennent que ce système fonctionne grâce à un traducteur entre les deux langages ADN et protéines, avec chacun son alphabet et sa grammaire.)
C’est intéressant. Cela pose question : Qu’est-ce qui peut produire un système aussi intelligent ?
Sur ce point « Aristote-Darwin »il s’avère que le débat est philosophique et non scientifique. Car il est tout aussi impossible de démontrer qu’une intelligence est à l’œuvre que de démontrer qu’aucun intelligence n’est à l’œuvre. C’est un pur débat d’interprétations. Le fait d’en prendre conscience permet de situer le débat où il est vraiment, et de convaincre les créationnistes fixistes américains (ou autres fondamentalistes ) d’arrêter d’enseigner la Création biblique dans les cours de sciences.
Cordialement
Bonjour, Je ne peux qu'approuver les observations de "Docteur en biochimie", en soulignant le fait que même pour un simple "honnête homme" qui se borne à suivre de loin l'actualité scientifique, l'article fait des erreurs et des impasses tellement considérables qu'elles mettent fondamentalement en cause la crédibilité scientifique de ce site. - L'erreur la plus manifeste est sans doute d'affirmer "pas de vie sans oxygène" alors que l'oxygène de l'atmosphère a précisément été apporté par la vie, qui lui est antérieure, - Ainsi également de l'impasse faite sur "le monde à ARN", qui par ses capacités de réplication pré-biotique fournit une hypothèse solide de chemin entre la matière inerte et la vie, - Enfin, prétendre que la proposition scientifique serait que la vie est l'œuvre du "hasard sourd muet, aveugle" est parfaitement trompeur, puisque cela fait l'impasse sur le mécanisme de sélection des réplicateurs, mécanisme naturel auto-organisateur et antérieur à la vie.
Il joue même un rôle absolument fondamental.
Sans lui, vous aurez beau avoir réuni tout ce qui est nécessaire pour “faire” du vivant, vous n’y arriverez pas.
Bonjour, Je vous remercie d'avoir corrigé votre article. Cependant, je ne suis pas d'accord avec certains points qui me semblent fondamentaux (cf mon message du 22/02). Mr Morin laisse entendre que ces points périphériques n'intéresseront que les lecteurs spécialisés. Je pense au contraire qu'ils constituent le coeur du débat. Je reste à votre disposition pour dialoguer. Bien cordialement,
Bonjour, Je pense qu'une formulation rigoureuse de votre proposition serait plutôt: On observe de façon relativement universelle chez tous les organismes vivants actuels un système complexe couplant deux langages (deux alphabets et deux vocabulaires), par un système de traduction passant par un intermédiaire (mais la machinerie qui le sous-tend, le ribosome, a pu évoluer différemment chez différentes espèces). Cette distribution commune semble indiquer qu'un tel système devait déjà exister chez le dernier ancêtre commun à tous les êtres vivants (à ne pas confondre avec les premières formes de vie). Savoir comment ce système de couplage s'est mis en place dans les premiers âges de la vie est une question qui est encore loin d'être résolue, même si plusieurs hypothèses ont été proposées. Bien cordialement
- Aleteia mentionne clairement dans son "A propos des questions de fond" qu'il s'agit de "problématiques et synthèses produites par des experts et validées par le comité de rédaction". Que vous ne vous vous présentiez pas comme un spécialiste, mais comme un curieux, c'est tout à votre honneur; le problème est cependant que vous êtes référencés comme tel par Aleteia. Je ne vous aurais certainement pas répondu ainsi si l'article avait été publié dans une rubrique d'opinions.
- Sans doute une partie de ma réponse est du pinaillage, mais la façon dont on traite les détails est assez significative selon moi. Une autre partie n'en est pas du tout. Ce qui est amusant, c'est que vous me reprochez un procédé (contester des détails pour rendre suspect le texte entier) dont vous servez vous-même avec Darwin, à qui vous attribuez une pensée qui n'est pas la sienne. Quand aux questions du monde ARN, ce n'est en rien un détail puisque c'est une hypothèse sérieuse de réponse au problème de l'origine du code génétique que vous éludez complètement.
- Je pourrais apporter une critique (constructive, je l'espère) à votre information essentielle sur le ribosome et le code génétique, qui est contestable (dans le sens ou on peut en contester la formulation et l'améliorer, car, formulée comme vous le faites, elle ne me semble pas correcte). Cependant, comme cela me demande un travail long de synthèse, je préfère m'assure d'abord que cette proposition serve à quelque chose.
- Dernière chose, pour que ma critique ne soit pas vue comme une attaque gratuite: j'apprécie certains paragraphes philosophiques du texte, qui ont beaucoup de sens à mes yeux. Cependant, je me dois de contester ce qui doit l'être dans mon domaine de spécialité.
Bien cordialement
Invitation à tout lecteur de vérifier lui-même sur ce site de Jussieu que je viens de découvrir : Ce petit paragraphe correspond au travail couronné par le prix Nobel de chimie 2009 qui avait attiré mon attention sur cette explication aux métaphores littéraires (langages traduction, alphabets, information, messager.)
http://www.snv.jussieu.fr/bmedia/SynthProt/SynthProt.htm
“Les différentes étapes de la biosynthèse des protéines
La biosynthèse des protéines est appelée traduction.
Elle a lieu au niveau du ribosome qui reçoit les ARN de transfert (transporteurs des acides aminés) et l'ARN messager (qui contient l'information nécessaire à la synthèse de la protéine).
La traduction est le passage d'un langage à un autre, la transposition d'un alphabet de 4 lettres (A, U, G, C) dans l'ARN messager, à un alphabet de 20 lettres (les 20 acides aminés) dans les protéines.
Le code génétique est la clé qui permet de passer d'un langage à l'autre.”
Bien cordialement
Brunor
S'il est bon que chacun puisse exprimer ses opinions sur le sujet, il est dommage ici que l'auteur de l'article puisse apparaître comme expert sur le sujet. Il y a plusieurs points qui ne sont visiblement pas compris et qui sont enseignés en licence de biologie:
- l'ADN n'a pas été découvert en 1953! Il était connu comme substance chimique depuis le 19e siècle, et on savait depuis 1944 (expériences d'Avery) qu'il est le support de l'information génétique. Watson et al. ont identifié sa structure en double hélice. Cela peut passer pour un détail, mais ça n'en est pas un! En tout cas, cela ne fait pas sérieux quand on veut entamer un dialogue serein et respectueux entre science et foi.
- le ribosome et le code génétique n'ont pas bougé depuis 3,7 milliards d'années?!? Sur quoi vous basez vous pour dire ceci? On rentre typiquement dans le domaine de la croyance et en rien dans la vérité scientifique.
- l'auteur confond les bactéries procaryotes avec les protozoaires (eucaryotes), ce qui est une bourde énorme qui suffirait à décrédibiliser durablement un biologiste. Le nom de protozoaire n'est d'ailleurs quasiment plus utilisé en sciences.
- l'auteur n'a visiblement pas compris la distinction entre la génération spontanée et l'hypothèse de Darwin sur l'émergence de la vie, dont les échelles de temps ne sont en rien comparables.
- la lumière n'est pas nécessaire pour tous les organismes vivants actuels, cf les faunes des fumeurs noirs).
- l'auteur ne parle jamais des ribozymes, ni de l'hypothèse du monde à ARN, qui sont des points importants quand on veut parler de l'émergence du code génétique.
Je n'écris pas ceci pour accabler l'auteur, mais tout de même cela n'est ni sérieux ni respectueux du travail scientifique. Si certains scientifiques à l'inverse plongent dans un matérialisme militant, il est inapproprié de plaquer ici des choses fausses ou déformées sous prétexte de se conforter à faible coût. Le travail scientifique est long, parfois aride et demande beaucoup d'humilité. Dialoguer avec les scientifiques demande donc de respecter leur travail, sans quoi il ne faut pas s'étonner s'ils ne prêtent pas attention aux propositions de dialogue entre foi et raison. En tout cas, en tant qu'enseignant en biologie moléculaire, je n'accepterais pas de la part de mes élèves un travail basé sur des approximations et des faits mal étayés. C'est bien de vouloir accorder foi et raison, encore faut-il le faire en étant fidèle à la vérité. Ce qui me fait peur, c'est qu'un scientifique sérieux et de bonne volonté tombe sur ces lignes et que cela lui donne une image fausse de l'attitude des croyants à ce sujet.
Une lecture intéressante, quoique assez difficile et adaptant un point de vue résolument matérialiste à ce sujet est : "le soleil, la Terre , la vie" aux éditions "pour la science". M. Morange a également très récemment sorti une admirable Histoire de la biologie qui démontre un vrai travail de scientifique, humble et respectueux, qui reste ouverte aux perspectives de foi.
Toujours est-il que grâce à vos critiques, je réalise que ces quelques lignes ci dessus, pourraient suffire à remplacer la totalité de l’article trop long, car elles sont simples, claires, précises et vérifiables mot à mot. Je soumets donc cette idée à Aleteia, en vous priant de bien vouloir excuser les tâtonnements d’un enquêteur qui n’a jamais eu la prétention d’être un “spécialiste” de la question mais qu’on est venu chercher pour relater ces informations trop peu vulgarisées, car j’avais essayé de le faire dans une série d’albums : les indices pensables.
Bien cordialement
Brunor