La seconde manière de comprendre « Dieu est amour » redonne à la Trinité sa place centrale. Elle applique « amour » à Dieu en représentant son être même comme mouvement, comme donation interpersonnelle, auto-communication, dynamisme d’un être-ensemble. Dans la Trinité, chaque personne est relation, c'est-à-dire don, et rien d’autre et le nom même des trois personnes divines qualifie leurs relations. C’est seulement parce que Dieu est Trinité qu’il peut y avoir « une place pour nous » en Dieu et cet espace pour nous en Dieu, c’est la deuxième personne de la Trinité, le Fils : nous sommes fils dans le Fils. Le mystère de la Trinité n’est pas seulement une connaissance qui se révèle à nous, c’est le mystère de notre insertion même dans le mystère du Christ, et par lui en Dieu. C’est le mystère de notre salut.
La Trinité est perpétuel avènement d’amour et de donation interpersonnelle. Dans la Trinité, chaque personne est relation, c'est-à-dire don, et rien d’autre
Il faut se représenter Dieu-Trinité non d’une façon trithéiste, non comme un Dieu « tripolaire » mais comme un événement continuel de l’amour, un dynamisme d’auto-donation et d’intégration, un espace lisse en termes de parcours du père au Fils et retour, du père à l’Esprit par le Fils et retour. La compréhension juste de Dieu-Trinité veut distribuer la divinité comme espace en mouvement au lieu de la répartir spatialement entre les trois. « Dieu n’est pas solitude infinie, mais éternel évènement d’amour » proclamait le saint Père Benoît XVI durant les vêpres de Pentecôte en 2006 sur la place Saint-Pierre. Il n’est pas l’éternel solitaire, si bienveillant soit-il. Au contraire, il n’est que don et joie infinie. Don et rien d’autre. En lui-même, puis pour nous.
Les noms des trois personnes divines qualifient leurs relations
Ainsi, remarquez que les noms des trois personnes divines ne sont pas des noms personnels (Jean, Jacques et Paul, par exemple) mais des noms qualifiant des relations (père, fils), donc chaque personne divine reçoit son identité de sa relation aux deux autres, totalement. Chacune d’elles se définit et se reçoit d’une autre. Le Père est paternité, toute en référence au Fils qu’il engendre éternellement, et il n’est rien en-deçà de cette paternité. Le Fils est tout entier dans sa relation filiale et aimante au Père, dont il se reçoit totalement et éternellement. L’Esprit commun au Père et au Fils n’est rien d’autre que cette communion d’amour entre eux. Bref, là où nous – humains – possédons notre identité propre sur laquelle se greffe par la suite toute une série de relations (« fils de », « époux de », « ami de », « père de », etc.), les trois personnes divines ne sont rien d’autre que ces relations d’amour, relations que saint Thomas d’Aquin qualifie du coup de « subsistantes ». Chaque personne divine est toute entière dans le don qu’elle est (et non qu’elle fait) aux deux autres personnes, et elle n’est rien en-deçà de ce don. S’il y avait « quelque chose subsistant en deçà », nous aurions trois dieux, et non un.
C’est ainsi seulement qu’il peut y avoir « une place pour nous » en Dieu
Le Concile de Tolède XI (673-676) décrit avec prudence le mode de ce « pluriel » en notre Dieu un : « Cette sainte Trinité, qui est un seul vrai Dieu, n’est pas hors du nombre mais elle n’est pas enfermée dans le nombre ». Parce qu’il y a – d’une certaine façon – une « pluralité » en Dieu (pluralité de personnes), Dieu peut se communiquer « hors de lui-même » sans se perdre dans ce don, dans cette auto-communication de son être. C’est ce qu’il fait dans la création, puis dans l’incarnation, enfin dans la rédemption. Parce qu’il est Trinité, il est don en lui-même (entre les 3 personnes), et du coup il peut être don hors de lui-même (dans la création et la rédemption).
Sans une certaine pluralité au sein même de l’unité divine, Dieu ne pourrait avoir créé un monde extérieur à lui-même, comme c’est le cas, ni des libertés humaines capables de s’opposer à la sienne par exemple. Il n’y aurait pas de place pour un monde authentiquement extérieur à Dieu (une « création »), et l’univers ne pourrait être qu’une émanation de Dieu lui-même (comme le croient les religions panthéistes).
De même, parce qu’il est un Dieu en trois personnes, Il est ce Dieu dont la trinité des personnes permet qu’il vienne à nous sans se perdre. C’est ce qu’il a fait par le Fils. L’incarnation de la deuxième personne de la Trinité est ce don gratuit que Dieu fait de lui-même, pour nous ramener à lui et nous accueillir dans l’intimité d’une relation aimante qui est son être trinitaire même. Dieu n’est pas seulement auto-communication en lui-même, mais également vers nous et pour nous. Chacune des trois personnes étant totale donation, et rien d’autre que ce don, Dieu est en lui-même désir, si bien qu’il peut aussi l’être également du créé, à commencer par les libertés humaines qu’il peut susciter, qu’il délivre, et finalement embrasse.
Reconnaître en Dieu la Trinité, ce n’est pas jeter un regard indiscret sur le secret de Dieu, c’est découvrir son vrai visage et comprendre comment nous pouvons nous insérer dans sa vie. La Trinité illumine jusqu’à notre amour humain ici-bas, qui se doit d’être ouvert au tiers. C’est le mystère de notre salut
Dieu est amour signifie essentiellement qu’Il est Trinité, un en trois personnes, et parce qu’il est tel, il est en-soi relation, auto-communication, don de soi. Dès lors, Dieu a la possibilité de se communiquer à nous, de se donner lui-même. La Trinité divine ouvre la possibilité pour la création. Elle nous ouvre un « espace » en Dieu, qui est celui de cette distinction des personnes.
Cet espace pour nous en Dieu, c’est la deuxième personne de la Trinité, le fils
Nous fumes créés « à son image », à l’image du Fils, à l’image de la deuxième personne divine. L’humanité est ce que Dieu pouvait assumer sans altérer sa nature divine. En des mots moins rigoureux, son Fils est ce que le Père avait en tête lorsqu’il a créé l’homme. Le Christ – parfait Adam - est « à la place que nous occuperons » en Dieu : « Comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi, qu'eux aussi soient en nous (…) Père, ceux que tu m'as donnés, je veux que là où je suis, eux aussi soient avec moi…» (Jean 17, 21s). Ce « là où je suis » est l’espace possible et gagné pour nous au sein de la Trinité. La seconde personne de la Trinité (le Fils) est notre résurrection, notre paradis, notre vie éternelle. « Je suis la résurrection et la vie » dit Jésus (« je suis… » et non « j’apporte… »).
Nous sommes fils dans le Fils
Uniquement. Au ciel, nous serons dans le Christ, c'est-à-dire « participants » totalement de la relation d’amour filial qu’il est au Père (2 Psaumes 1,4), et nous recevant totalement du Père, par l’Esprit Saint. Voilà notre place au sein de la Trinité. Voilà notre incroyable destinée. Sans la Trinité des personnes dans l’amour divin, pas de place pour nous. Nous ne serions même pas là à lire cet article. « Toute l'histoire du salut n'est autre que l'histoire de la voie et des moyens par lesquels le Dieu vrai et unique, Père, Fils et Saint-Esprit, se révèle, se réconcilie et s'unit les hommes qui se détournent du péché » (CEC 234). Ainsi, le mystère de la Trinité n’est pas une connaissance stérile et extérieure à nous, comme la connaissance du nom d’une galaxie lointaine. Il n’est pas un mystère incompréhensible et in-questionnable que nous devons accepter dans la foi : c’est le mystère même de la possibilité de notre être et de notre insertion en Dieu (cette insertion qui est notre salut).
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Merci pour ces "explication" sur le mystère trinitaire. Il me semble qu'on ne peut l'approcher qu'en le contemplant tant il est beau et nous révèle un Dieu Amour doux et humble, d'une humilité ineffable tant elle est sans mesure . M Zundel l'appelle "la perle du Royaume, le joyau incomparable,l'immense nouveauté de la confidence trinitaire que nous fait le Seigneur". Il a écrit quelques poèmes magnifiques sur ce mystère: "Dieu est Dieu parce qu’il n'a rien,en lui l'Amour est une relation à un Autre, en lui tout est désapproprié. Dieu est l'éternelle Pauvreté qui ne se possède pas mais se donne ...." J'ajoute que la kénose du Fils (Ph 2,5-11) illumine ce mystère trinitaire en nous ouvrant, par son action de grâce au Père dans son obéissance jusqu'à la croix, au don sans reste du Père qui est kénose intra divine( qui voit le Fils voit le Père dit Jésus). Et l'Esprit tient le Père et le Fils dans une pure distance , ouvrant ce mouvement d'amour entre le Père et le Fils en un débordement éternel vers ses fils adoptifs
Dieu s'est révélé trine dès le péché originel, dans le cadre de la mise en oeuvre du plan de rédemption qui est un plan de réparation des dégâts du péché originel en nous. 1-Notre Créateur, c'est Dieu le père. 2-Dieu le fils est venu nous montrer comment nous devons procéder, par les vertus de l'humilité et de l'obéissance puis par la mise à notre disposition de puissants moyens de sanctification que sont les sacrements. 3-Le Saint-Esprit, c'est l'amour de Dieu symbolisé par le feu de la charité à réactiver en chaque chrétien catholique. C'est donc par un indicible acte d'amour que Dieu se révèle en trois(3) personnes pour nous faire acquérir la vie éternelle.