L'Inquisition : perversion de la mission de l'Église ?
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1.
L’Inquisition (du latin « enquêter ») est un tribunal d’Église, dont la mission était la répression de l’hérésie. Formalisée au Moyen-Âge et active jusqu’au XIXe siècle, l’Inquisition a recouvert trois réalités différentes : l’Inquisition médiévale (XIIIe - XVe siècles), l’Inquisition espagnole (1478-1820) et l’Inquisition romaine (à partir de 1542), qui n’ont pas agi partout avec les mêmes objectifs ni la même intensité.
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2.
L’Inquisition espagnole - réputée la plus dure - est refondée au XVe siècle dans un royaume en quête d’unité. Ses excès s’expliquent en partie par un contexte de grandes tensions sociales et religieuses, à la fin de la Reconquête sur les Maures.
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3.
Attention aux jugements de valeur anachroniques. Le principe de l’Inquisition appartient à un temps révolu : la justice avait partout recours a des méthodes violentes, et l’Église était, aux côtés des pouvoirs civils, la garante du lien social de cette époque. Dans un contexte où la société civile était adossée à la société religieuse, et inversement, elle a introduit dans la gestion du religieux des formes d'action propres de la gestion civile. Elle était, aux côtés des pouvoirs civils, la garante du lien social de cette époque.
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4.
L’Inquisition cherchait à sauver les âmes, avant de condamner. Les procédures inquisitoriales nouvelles créées pour identifier les hérétiques marquaient un progrès par rapport à la justice civile de l’époque. Ces procédures ont contribué au fondement de la justice moderne. Certains accusés préféraient même les tribunaux de l’Inquisition à la justice civile.
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5.
L’Inquisition a autorisé un usage encadré de la force. Elle n’a jamais eu le pouvoir de condamner à mort, mais elle livrait au bras séculier pour l’application de la sentence. L’Inquisition espagnole a fait dix mille victimes en six siècles : c’est trop, mais c’est peu au regard des cinquante mille sorcières brûlées dans le monde protestant au début du XVIIe siècle. Ailleurs, la peine de mort est restée un châtiment parmi d’autres, qui devient exceptionnel dès la fin du XIIIe siècle.
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6.
Il reste que les chiffres ne changent rien au fond : un seul tué au nom du Christ est déjà un scandale. L’Église a demandé « pardon pour le consentement donné à des méthodes d’intolérance et même de violence » (saint Jean-Paul II). Quelle autre institution assume ainsi 2000 ans d’histoire en vérité ?
Jean-Pierre Dedieu, directeur de recherche au CNRS, enseigne l'histoire moderne. Spécialiste reconnu de l’histoire de l'Espagne, il a consacré sa thèse à l'Inquisition espagnole et a été consulté par le Saint Siège lors de commissions théologiques sur la mémoire de l’Église.
- Après le roi. Essai sur l'effondrement de la monarchie espagnole (Madrid, 2010)
- L'Espagne de 1492 à 1808, (Paris, 2005)
- Les mots de l'Inquisition (Toulouse, 2002)
- L'administration de la foi: l'inquisition de Tolède (Madrid, 1992)
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commentaires
postés
Le commentaire d' Hélène comporte au moins une erreur. Seuls les chrétiens étaient "jugés" par les Tribunaux de l'Inquisition. Sa phrase comparative est difficilement lisible.
l'Inquisition n'a certainement pas fait 10000 victimes ni "des millions" de victimes comme le prétend la rumeur. C'est très exagéré. En revanche, Bernard Gui présida plus de 930 affaires d'hérésie durant les dix-sept années qu'il fut Grand inquisiteur à Toulouse (1306-1323). Parmi ces 930 affaires, seulement 42 personnes furent condamnées à mort soit environ 5 % des cas. Son collègue Torquemada de l'Inquisition espagnole, n'a exécuté que 1 % des hérétiques qu'il jugea soit une poignée de personnes.
Le contexte historique n'était pas tendre : on en a un témoignage dans le roman de Tristan et Yseut ainsi que dans de nombreux témoignages historiques.
C'est une vision idyllique de l'inquisition. Pourtant quelque chose ne correspond pas à vos propos. La condamnation à mort de Jeanne d'Arc montre toute la perversité d'une institution , ainsi que la douleur de la victime. Tout y est filmé "par écrit" pas à pas, non pas pour mille ou deux mille personnes, mais pour une seule. Ainsi, on ne saura jamais le mal exact qu'a fait l'inquisition, mais on a un témoignage écrit de A jusque Z. Il reste aussi les instruments de torture. on dit peu qu'une compagne de Jeanne a été brûlée à Paris. On n'en parle pas, ....parce qu'elle n'était pas sainte, elle n'était pas l'Envoyée de Dieu et de Saint Michel. A-t-elle moins souffert? c'est une terrible injustice ... Il semble que les inquisiteurs aient repris toute la panoplie des peines abandonnées par les Romains, lorsqu'ils martyrisèrent tant de personnes : le feu ( saint Polycarpe) et la torture raffinée.. en effet dans l'humain il y a une tendance à aimer faire souffrir son semblable. Il y avait aussi tout un rituel ( le san benito) est ce vraiment cette religion que le Christ prêchait, même quand il a parlé de bourreau et de prison pour ceux qui ne savent pas pardonner? était-il tellement plus douloureux d'être gazé sous Hitler que brûlé vif sous l'Inquisition en tant que juif, de sorte que personne ne fera le rapprochement? En bref , ne serait ce pas de l'inquisition dont Marie à La Salette, née avant notre ère, nous parle lorsqu'elle dit, ce ne sera un secret pour personne, Rome perdra la foi et deviendra le siège de l'Antéchrist?