Pour donner force, puissance et sens à son œuvre, l’artiste a besoin d'aller puiser à la source et de s'appuyer sur les pasteurs. Il y a urgence que se renoue un vrai dialogue entre les artistes et l'Église.
Il y a urgence que se renoue un vrai dialogue entre les artistes et l’Église
L’art chrétien serait-il mort ? Non ! On associe l’art chrétien à l’art figuratif : le lien entre art et incarnation explique un tel rapprochement. Notre Dieu, en se faisant homme, s’est donné à voir, donc à représenter. Mais l’art chrétien peut malgré tout, et l’histoire l’a prouvé, emprunter les chemins de l’abstraction. Il existe aujourd’hui de grands artistes chrétiens, des artistes courageux. Mais il y a aussi urgence que se noue, se « re » -noue, un vrai dialogue entre les artistes et l’Église car l’art chrétien ne peut s’envisager isolé de la communauté qui porte la foi.
L’Église doit redevenir initiatrice et inspiratrice de création
Pendant des siècles, l’art chrétien fut le fruit d’un fécond dialogue entre les artistes et les clercs, les prêtres et les théologiens. L’Église d’aujourd’hui n’est plus (ou alors exceptionnellement) mécène. Elle ne commande plus d’œuvres. Pourtant, il est essentiel, et Jean-Paul II y a invité à plusieurs reprises, que le dialogue entre magistère et art soit renoué. L’Église doit redevenir initiatrice et inspiratrice de création. Ce dialogue est nécessaire et il est fécond. Et cela peut être d’une extrême simplicité : faire découvrir une belle page d’Évangile à un artiste qui va s’en saisir pour la représenter. Tous les artistes ont besoin de cela en fait, d’être nourris. Et quelle meilleure nourriture que la parole de Dieu ? L’art chrétien ne peut pas être créé seul, de manière autocentrée. Il faut qu’il émerge des richesses de la communauté toute entière, ce qui passe par le dialogue.
Paul VI s’adressait ainsi aux artistes : « Nous avons besoin de vous - dit-il. Notre ministère a besoin de votre collaboration. Car, comme vous le savez, notre ministère est celui de prêcher et de rendre accessible et compréhensible, et même émouvant, le monde de l'esprit, de l'invisible, de l'ineffable, de Dieu. Et dans cette opération, vous êtes des maîtres. C'est votre métier, votre mission ; et votre art est celui de saisir du ciel de l'esprit ses trésors et de les revêtir de mots, de couleurs, de formes, d'accessibilité » (Insegnamenti II, [1964], 313).
Le dialogue de l’Église et des artistes est toujours très fécond
Il y a des précédents historiques qui illustrent cette fécondité du dialogue entre l’Église et les artistes : dans la première moitié du XVIe siècle, le monde artistique connaît une crise, « le maniérisme », qui est un moment où l’effet était poursuivie pour elle-même, au détriment même de la vérité qu’elle prétendait représenter. Les critiques des protestants n’étaient ainsi pas injustifiées. Que s’est-il passé ? Lors du Concile de Trente, les pères conciliaires ont demandé que la question soit envisagée, non par le magistère de l’Église, mais pastoralement. La conséquence fut presque immédiate. Une remarquable fécondité, des chefs d’œuvres absolus sont nés de ce dialogue entre les artistes et l’Église. L’un des très bons exemples de cette fécondité du dialogue est l’œuvre de Caravage. Caravage est un peintre très puissant qui touche énormément les gens et qui est aussi aujourd’hui un « chemin » d’évangélisation formidable. Son œuvre s’est produite dans un dialogue constant avec l’Église, un dialogue parfois vif mais un vrai dialogue : et l’art se nourrit de cela. Il y a vraiment un devoir de la part de l’Église d’inspirer pour susciter des vocations nouvelles. Quand l’art chrétien est essoufflé, il a besoin de se renouveler en retournant à la source : l’Écriture et la prière, et en communauté, pas seul. C’est un défi pour aujourd’hui.
modérateur du thème :
Pierre Dohet
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